Écrits

LA JONQUE

Pars !
Loin de cet enfer, pars !
Loin de ce faux départ,
Ta mine flétrie, tes yeux hagards,
Loin des immondices
Et de ce monde factice.
Si ta vie n’est que gâchis,
Une lente agonie :
Fais entendre ta voix
Impose-leur ton choix.
Accoste en terre étrangère
Elle te sera familière.
Embarque et absorbe la sève
Elle saura soigner ta fièvre.
Sur le néant tu vogues, tu tangues, tu chavires
Tu rêves exil mental, psychédélique navire.

Elle est là ! Elle approche ! Elle lavera
Ton cerveau. Ton caveau ? Il attendra.
À son bord, plus de mal de mer
À son bord, plus d’idées amères.
Si la vie te baise et n’est qu’un grand malaise
Si ton existence n’est que nuisances
Si elle t’apparaît vide et quelconque :
La jonque.

Laure Durand

………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

MONDES IMPOSSIBLES

Mémoire ravivée d’un futur effacé
Oncques ne brillas tant qu’en ces tons anthracites.
Notre chemin se perd, dévoré par la fuite,
Déambulant dans un dédale sans lacets.
Et dans notre œil crevé la vision ressuscite
Soudain d’un autre temps fantasquement glacé.

Intrigantes statues, majestueux palaces,
Monstrueuse chimère abhorrée par Euclide,
Par les rues des cités perchées au bord du vide
On sent s’amuir le temps qui se fige et trépasse.
Sauve-toi, Thésée fou, qui avec tes séides
Sans le fil d’Ariane pénètres ces espaces,
Inconscient, prenant l’œil surplombant pour guide,
Bravant ses traits brûlants sous lesquels tout s’oxyde.
Loin d’un réel pesant, dans lequel on s’impasse,
Ensemence l’humus des folies impavides,
Sois, mémoire, reflet de nos rêves timides,

Hélas.

Fabrice Robert

………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

L’ENVOL

Restreinte et impérieuse,
Une ligne de perspective qui s’efface,
Comme la vie d’une inconnue qui s’impose envers et contre tout.
Par exemple sous la forme d’une gravure.

Au commencement, il n’y aurait pas de rencontre.
Ainsi l’ont recommandé les stratégies obliques.
Pas d’homme, pas de femme,
Pas d’unité de temps ou d’action.
Juste l’unité de l’abandon.
C’est là où l’allure se trouble,
Contrainte à se dédire
Mais ce n’est que partie remise
A plus tard, pour la passion qui s’attarde.

Sous un soleil qui n’est pas vraiment là,
L’élan se répercute,
Aux quatre coins de la chambre
Comme l’écho qui s’époumone
Par ricochets, par croisements de jambe,
L’écho a tout son temps,
Toutes ces minutes qui ne lui appartiennent pas.

Tout ça pour une ligne de perspective qui tue.

Daniel Romero