La gravure

La gravure et l’impression

Les techniques de gravure

Dès la préhistoire apparaissent sur des pierres des signes gravés qui peuvent avoir été d’ordre décoratif ou cultuel. À la suite de ces premières traces, sont apparues à époque historique des intailles, à savoir des pierres sur lesquelles furent gravés en creux une image ou des signes, dont on pouvait prendre une empreinte en relief sur un support souple.

Ces premières manifestations ont contribué, au fil du temps, à donner naissance à la technique de la gravure, dont l’existence comme telle remonte à la fin du Moyen Âge. Elle a permis de transmettre toutes sortes de messages, ce qui en a fait un réel moyen de communication et de diffusion. De fait, véhiculant une idée par le biais d’une image, y compris lorsque celle-ci était insérée dans des livres, elle prend peu à peu le pas sur l’oralité.

Laissant de côté l’aspect historique, dont nous venons de donner un aperçu volontairement succinct parce que ce n’est pas l’objet de ce texte, nous préférons aborder ici plus en détails la dimension technique de cet art.

L’on classifie communément les différentes techniques de gravure en deux catégories : la taille directe et la taille indirecte. Est appelé direct un procédé de gravure dans lequel la main de l’artiste travaille directement le support grâce aux outils tels que le burin ou la pointe sèche. Quant à la taille indirecte, il s’agit inversement des cas où l’artiste recourt à un acide ou une résine pour creuser sa plaque.

Parmi les techniques de taille directe, mentionnons en premier lieu la taille d’épargne dans laquelle, comme son nom l’indique, le dessin est épargné. Cela signifie que le dessin présent sur le support en bois est détouré : il apparaît en relief, tout le reste de la plaque étant creusé. Lors de l’impression, ces creux produits à l’aide de gouges apparaissent blancs. Une fois la plaque terminée, toute la surface de la plaque est encrée à l’aide d’un rouleau, puis une feuille y est appliquée. Après une forte pression verticale, la feuille peut être retirée de la presse et le tirage est alors terminé.

L’usage du burin constitue une deuxième technique de taille directe. Le support est une planche de métal, généralement de cuivre, travaillée directement avec l’outil. Le dessin est donc gravé immédiatement sur le support, contrairement à la taille d’épargne. L’ébarboir sert à supprimer les barbes de métal formées autour des creusées, certains petits amas repoussés étant parfois jugés indésirables. Dans ce cas, ce sont les espaces creusés qui apparaissent en noir à l’impression.

Autre technique de taille directe, la pointe sèche. La gravure résulte de diverses rayures que réalise la main tenant l’outil. La plaque est gravée directement à l’aide d’une pointe sèche. Ces rayures sont bordées de barbes donnant au trait un caractère très particulier, moins profond que celui réalisé au burin.

La dernière technique de taille directe est la manière noire, procédé qui consiste à préparer la plaque de métal à l’aide d’un berceau. Cet outil permet de créer une multitude de sillons superposés qui lors de l’impression laissent apparaître une surface noire. Le brunissoir écrase ensuite les barbes ainsi formées afin de révéler les zones blanches.

Considérons à présent deux techniques traditionnelles de taille indirecte, l’eau- forte et l’aquatinte.

La première se caractérise par l’utilisation d’un acide ou eau-forte. La planche de métal est recouverte d’un vernis sur lequel le graveur trace un dessin à l’aide d’une pointe sèche qui découvre ainsi le métal. Une fois le vernis partiellement enlevé, la plaque est plongée dans un bain d’acide dilué. L’eau-forte attaque les parties non protégées par le vernis et creuse ainsi le trait préalablement dessiné. Lorsque la profondeur – ou morsure – est jugée suffisante, le support est retiré du bain, puis rincé. La planche est alors prête à être imprimée sur papier.

La technique de l’aquatinte se rapproche de celle de l’eau-forte. La seule différence est que la plaque, avant la plongée dans l’acide dilué, est recouverte de résine dans des endroits spécifiques non protégés par un vernis. La plaque est ensuite chauffée afin que la résine durcisse. Cette dernière n’étant pas imperméable, elle permet d’obtenir une teinte régulière après nettoyage de la plaque.

Le tirage ou l’impression des tailles-douces

Le tirage des tailles-douces nécessite une presse conçue dans ce but. Les plaques gravées sont recouvertes entièrement d’encres typographiques, diluées avec un peu d’huile de lin, avec une insistance toute particulière dans les creux, afin que l’encre y pénètre mieux. Une fois la plaque encrée, on peut procéder à un essuyage délicat, avec une tarlatane qui permet d’enlever le surplus d’encre tout en laissant celle présente dans les creux. Le papier recevant l’impression est légèrement humidifié pour augmenter sa souplesse, puis disposé sur la plaque. Tous deux passent alors dans une presse – deux rouleaux qui compressent les deux surfaces afin que l’encre de la plaque se dépose sur le papier.

(Extrait du livre « Cheminement vers les Mondes Impossibles, une pratique artistique » de Fabrice Robert et Diane Latrille)


Cette vidéo a été réalisée dans les ateliers Moret-Manonviller (Paris V) par l’association AAM (Art et Artistes à Montgeron).